Mes haïkus de la semaine

Mes haïkus de la semaine – comme d’habitude, tous les textes sont Tous droits réservés © Julie Turconi (reproduction ou utilisation interdite sans l’autorisation de l’autrice, merci!)

jour de pluie ~
une flotte d’escargots
à l’assaut des troncs

Je crois bien qu’on a compté une vingtaine de petits escargots jaunes escaladant lentement le tronc du gros érable de Norvège, devant chez nous, en ce jour de pluie continue. Ont-ils soudain des envies de ciel ou de hauteurs? À quoi peuvent donc bien rêver les escargots?

 

le nez sur la vitre ~
entre les gouttes de pluie
son univers

Ce pourrait être un enfant, le nez collé au carreau, qui regarde les escargots progresser ou la pluie tomber sans pouvoir aller jouer dehors… mais ce serait plutôt le chat du voisin, couché sur l’appui de fenêtre, qui contemple son royaume!

 

un frisson discret
sous l’assaut des éléments
l’automne s’encabane

Ah, l’automne et ses changements d’humeur! Je ris, je pleure, je boude… Cette semaine, vent et pluie se sont conjugués pour mettre fin à toute velléité de longue marche dans les rues de ma ville. L’automne, et cette année plus que toute autre (pseudo re-confinement oblige), on s’encabane!
(N. B. : s’encabaner, au Québec, c’est, au propre, se réfugier chez soi, dans sa cabane, et au figuré, s’éloigner des autres, se retirer de la société).

 

un morceau de ciel
brouillé par mon passage ~
la pluie reprend

Profiter d’une éclaircie pour sortir et prendre l’air (frais) du dehors après des jours de pluie, que cela fait du bien! Je marche dans les flaques, troublant leur surface, ridant les images qu’elles me renvoient, créant un monde surréaliste fantastique… L’eau, cet élément vital, m’est nécessaire. Le fleuve, la mer et, à défaut, la pluie. On prend ce qu’on peut!

 

des bottes de pluie
rouges comme les feuilles ~
un rire cristallin

Je ne suis pas la seule à être de sortie, on dirait. Un gamin saute à pieds joints dans une flaque, sous le regard de sa mère, qui aimerait visiblement passer à autre chose. Mais elle patiente. Tant mieux, c’est à cet âge qu’on se fabrique de beaux souvenirs.

 

la montagne
se perd dans le brouillard ~
la ville se tait

La montagne (le Mont-Royal qui se dresse en plein cœur de Montréal, ndlr), oui, mais aussi la tour du Stade olympique, qui semble se dissoudre dans le gris ouaté du ciel si bas. Devrons-nous bientôt lever les bras pour soutenir le ciel, comme dans certains contes? Je ne sais pas si j’en aurais la force…

 

assemblée de mouettes
sur le terrain de soccer ~
le vent se lève

Les mouettes semblent, elles aussi, manquer de courage. Elles ne criaillent ni ne volent. Elles sont immobiles, silencieuses, collées les unes aux autres par toute cette humidité, piètres remplaçantes des joueurs qui peuplent habituellement le terrain l’été (pas cet été, toutefois…). Le banc ne serait pas détrempé, je m’y assiérais peut-être pour leur tenir compagnie, de loin. Mais le vent se lève, ma torpeur se dissipe et je poursuis ma route.

 

tombées au combat
les feuilles soubresautent ~
un front froid s’en vient

Après la pluie, le beau temps? La fraîcheur, en tout cas. Les arbres frissonnent tant qu’ils en perdent leurs habits multicolores, qui viennent revêtir le macadam dans un dernier sursaut de vie. C’est beau, la mort, parfois.

 

potager vide ~
au four, en soupe ou gâteaux
vivent les courges!

L’automne, c’est aussi la saison des pommes et des courges, deux délices à préparer de mille et une façons. Ce que je fais. La maison entière embaume les épices et me souhaite la bienvenue.
L’art de se réinventer (!) en cuisine, à défaut de le faire dans mon métier en attendant le retour à des conditions normales de pratiques scéniques…

 

nuit d’insomnie
lueur des lampadaires
sur les feuilles mortes

Quelques rescapées s’accrochent aux branches, habillant le décor de mes nuits, ce carré de fenêtre où se joue le théâtre des éléments. Je devrais dormir.
Je pense trop.



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